Réactualiser les techniques forestières anciennes

Gestion forestière

Réactualiser les techniques forestières traditionnelles

Au hasard de partages sur un groupe FB, je suis tombé sur un document publié par la FAO dans les années soixante à destination des populations du Tiers-monde. Il détaille et décrit des techniques low-tech utilisées traditionnellement par les forestiers européens à l’époque ou ils ne disposaient ni de tronçonneuses, ni de tracteurs forestiers, ni de camions. Ils avaient leur force physique, éventuellement celle des animaux. Mais surtout, quand bien même ils ne connaissaient que l’école de la Vie, ils avaient une compréhension des lois physiques élémentaires et un sens de la débrouille, ce qui leur a permis de déplacer des montagnes. Cette science ingénieuse, cet art, ces savoirs, ont permis à nos ancêtres de défricher des forêts, d’extraire des billes de bois et des blocs de pierre, de construire des fermes, des châteaux, des cathédrales ou des pyramides.
Alors que la fin des énergies faciles se précise, que les prix des matières premières explosent, que les tensions internationales et les pandémies perturbent la libre circulation des biens et des marchandises,

Le soleil se couchant derrière une forêt dense.

que l’État brade notre patrimoine forestier sur le marché international et que les filières locales s’effondrent, il pourrait être salutaire de se réapproprier ces techniques et ces méthodes afin de se garantir un accès direct à la ressource et se préserver des pénuries et de la spéculation.
Notre patrimoine forestier touche à des dimensions multiples : économiques, culturelles, sociales et bien évidemment écologiques, l’enjeu de ce siècle et de ceux qui suivent. Ici en France, on ne peut pas faire grand chose pour l’Amazonie mais on peut faire chez soi. De plus en plus de nos concitoyens l’ont bien compris et mènent des projets afin de pallier la faillite avérée de l’État en matière de gestion forestière et écologique.

animation anture enfants en limousin
Vieux châtaignier limousin


Sur notre territoire limousin, Lou Picatau, un groupement forestier citoyen, rachète des parcelles forestières à des fins de préservation et de gestion raisonnée. C’est le cas de beaucoup d’amis, ici et ailleurs, qui se passionnent pour le bucheronnage et la charpenterie à la hache.
De même, de plus en plus de professionnels indépendants choisissent de travailler avec des moyens légers, de façon sélective et en valorisant le bois localement.
Beaucoup de savoir-faire ont malheureusement disparu au fur et à mesure des progrès de la technologie industrielle et de la mécanisation, qu’il s’agisse de la gestion des forêts, de la menée des arbres ou de la façon.

Dans cet article, un chercheur du CNRS, dénonce les idées reçues dans la reconstruction de la charpente de Notre-Dame de Paris. D’après les recherches, les charpentiers du Moyen-Age taillaient leurs poutres dans des jeunes chênes coupés en vert menés en futaies denses et serrées, et la totalité de la charpente aurait été extraite d’une coupe rase sur trois hectares à peine.

vacances famille limousin nature

Pourquoi alors prélever des sujets plusieurs fois centenaires et les travailler en sec ? Puisqu’il a été décidé de reconstruire la forêt à l’identique, il serait logique de profiter de ce chantier grandiose pour réactualiser les connaissances et les pratiques anciennes. Et puisque les vannes de la pompe à billet sont ouvertes en grand, pourquoi ne pas financer la formation de jeunes charpentiers-forestiers aux techniques anciennes ?

Chez nous, à la ferme des Simples, nous vivons le bois comme une ressource nécessaire aux différents aspects de notre subsistance, les fruits, le chauffage, les clôtures, le jardin, des constructions, du mobilier, des outils. Mais pour nous, le bois est surtout un milieu que nous partageons avec d’innombrables formes de vie animales, végétales, mycètes, bactériennes… Les arbres structurent le paysage dans lequel nous évoluons. Ils sont les piliers de notre écosystème avec lequel nous co-existons. Nous respirons leur haleine. S’ils expirent, nous mourrons avec eux. Ils étaient là avant nous et nos vies ne durent guère que le temps de leur enfance.

Même après leur mort, les arbres continuent de subvenir aux besoins de tout un monde. Ils forment un substrat, l’humus, qui permet aux générations de prospérer et à la Vie de s’enrichir. Humus, homo. C’est la même racine indo-européenne “hum”, la terre.

Il était logique que nos Ancêtres, qui vivaient au contact permanent de la forêt, vouent un culte aux arbres les plus remarquables. Ils sont des dispensateurs de bienfaits, des témoins du temps qui passe, un lien vital entre Terre et Ciel, pourquoi pas la demeure des génies. En ces temps de crise, sans doute devrions-nous les honorer, leur donner des noms, cultiver la mémoire de leurs bienfaits et perpétuer une culture millénaire de la Terre et de la Vie.

Jean – La Côte – décembre 2021

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